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des éditeurs et annonceurs se disent prêt à cibler sans s’appuyer sur les cookies tiers (Keith Pieper, vice-president de l’adtech Sovrn)

Sous couvert de leur engagement à respecter la vie privée des internautes, Apple et Google ont tous deux accéléré les annonces depuis l’année dernière quant à la fin imminente de l’utilisation des cookies tiers dans leur navigateur. En ce début 2021, Google Chrome dévoile même un calendrier pour le test de nouveaux systèmes de ciblage… L’enjeu : basculer d’une approche one to one à des dispositifs one to many plus anonymisés, tout en maintenant le niveau de performance des campagnes publicitaires digitales.

Créés dans les années 90, les cookies permettent d’identifier un internaute et de le suivre dans son parcours web. Ils rendent possible la mémorisation des informations personnelles et de sa navigation web à des fins de retargeting et de publicités personnalisées en marketing programmatique. Les audiences sont ainsi mieux ciblées et la pression publicitaire maîtrisée. Les annonceurs peuvent également suivre l’efficacité des campagnes digitales : nombre de visiteurs uniques, nombre de clics, etc. Mais dans un contexte RGPD qui renforce depuis 2018 les règles de consentement à l’utilisation des données personnelles, notamment dans une démarche publicitaire, les navigateurs web, dont Google, ont annoncé la fin de l’utilisation des cookies tiers, c’est-à-dire des cookies 3rd Party Data.

Alors, réelle innovation au service des consommateurs ou nouvelle initiative pour prendre le monopole sur le marché du ciblage publicitaire : d’aucuns s’interrogent… et une enquête a même été lancée au Royaume-Uni par l’autorité de la concurrence, la CMA (Competition and Markets Authority). Par quelle(s) technologie(s) les cookies tiers vont-ils donc être remplacés ?

Ce n’est pas la fin de tous les cookies !

La fin des cookies annoncée par les navigateurs concerne les cookies tiers et non les cookies 1rst Party Data qui, eux, sont directement liés au site web sur lequel est présent l’internaute. Ces derniers sont en effet utiles pour conserver les données d’identification, les préférences du client, etc. Toutefois, les pratiques ne semblent pas toujours conformes à la réglementation puisque, dans certains cas, les utilisateurs sont contraints d’accepter, sinon l’accès au site est refusé et parfois la demande se fait de façon passive – méthode du “soft optin” par le scroll de la page ou le clic sur la page suivante – si bien que la CNIL ne tolère plus cette pratique.

Elle vient ainsi de publier une page de questions-réponses pour expliquer les nouvelles lignes directrices, comme l’importance d’un consentement qui doit être explicite, par un bouton “Accepter” ou “Refuser” par exemple.

D’autre part, un nouveau règlement ePrivacy est en cours de préparation à l’échelle Européenne pour venir remplacer la directive ePrivacy de 2002, qui complète le régime de protection des données RGPD. Ce nouveau projet concerne toutes les communications digitales (textes, emails, réseaux sociaux) et est censé protéger les individus contre une utilisation tiers sans accord préalable de leur part de leurs informations et communications privées. Il met en avant l’importance d’un consentement explicite avant l’utilisation de cookies et traceurs sur un site web ou une application mobile.

La fin des cookies tiers favoriserait-elle donc les sites à forte audience, comme les médias mais aussi les navigateurs puisque les données issues de YouTube et des requêtes du moteur de recherche Google, par exemple, en font partie.

FLoC, le système de cohortes proposé par Google

Google avait présenté il y a quelques mois un ensemble de pistes pour de nouvelles solutions de ciblage sous le nom de “Privacy Sandbox 2022”. L’entreprise semble avoir finalement accéléré son choix puisque dans un article de blog David Temkin, Director of Product Management Ads Privacy and Trust de Google, a annoncé que l’hypothèse de créer des identifiants qui permettraient de suivre les individus est abandonnée au profit d’une “voie vers un Web davantage axé sur la confidentialité” et l’annonce d’un calendrier pour tester le système de cohortes FLoC (Federated Learning of Cohorts).

Il s’agit de regrouper plusieurs milliers internautes, au moins 5000 (pour éviter l’individualisation) qui présentent des mêmes comportements de navigation. “Chrome a l’intention de rendre les cohortes FLoC disponibles pour des tests publics via des essais avec sa prochaine version ce mois-ci, et nous prévoyons de commencer à tester les cohortes FLoC avec des annonceurs dans Google Ads au deuxième trimestre”, a annoncé David Temkin.

Or, un utilisateur ne peut appartenir qu’à une seule cohorte, ce qui pose un souci sur une potentielle identité unique à des fins de ciblage. Ainsi, certains s’insurgent : chacun devrait avoir le choix de présenter, selon sa volonté, tout ou partie des différents aspects de sa vie et de son identité. Le système de cohorte empêche donc une séparation des contextes, présentant un même résumé comportemental pour une même personne auprès de tous les sites avec lesquels elle va interagir(1).

Le ciblage contextuel

D’autres acteurs du web invitent à un changement de paradigme, pour ne plus être dans une approche “people centric” mais “context centric”, afin de cibler les internautes non plus en fonction de leurs caractéristiques mais celles des contenus regardés : contenus éditoriaux (rubrique sport, décoration-maison), par mots-clés ou sémantiques (se mettre au running, installer un bureau dans son salon).

L’objectif étant de capter des intentions et des intérêts pour permettre une publicité affinitaire tout en évitant les erreurs de sens. Cette démarche, avec l’intégration de tags ou non sur le site éditeur, ne nécessite pas l’obtention du consentement de l’internaute et s’affranchit de la data personnelle pour une data contextuelle. L’enjeu sera aussi pour chacun de bien travailler le contenu éditorial de son site, dans une logique d’inbound marketing, afin de pouvoir commercialiser des espaces publicitaires contextualisés.

Ainsi, la solution d’un nouvel identifiant unique anonymisé sera-t-elle préemptée par d’autres acteurs du web que les navigateurs ? Quid aussi des modèles de mesure et d’attribution des achats si le fonctionnement de la publicité digitale se réorganise en silos : le risque est de basculer vers une mesure au dernier clic vs un système de multi-attributions … tout comme la possibilité future de continuer à limiter la pression publicitaire (capping).

Un récent livre blanc de l’IAB confirme qu’il n’y a pour le moment pas de solution idéale pour remplacer les cookies tiers : « Faute d’une technologie de substitution unique à date, les professionnels explorent différentes approches comme les cookies first party qui subsisteront au-delà de 2022 les API de la Privacy Sandbox de Chrome, mais également les ID publicitaires ou la publicité contextuelle« , résume Augustin Decré Managing Director.

A suivre donc…

(1) https://www.eff.org/deeplinks/2021/03/googles-floc-terrible-idea

A propos de l'auteur

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Lionel Arnaud

Lionel a intégré les équipes de la société CARTÉGIE en 2008. Ancien responsable du marketing opérationnel au sein du Groupe IDAIA, son poste n’a cessé d’évoluer, tant la vision marketing est mouvante. D’un point de vue purement personnel, c’est un papa comblé qui restaure à ses heures perdues une demeure de caractère à la campagne. Une fois arrivé au bureau, son énergie est dépensée efficacement en faisant des blagues (souvent nulles) à tout-va et en essayant de faire peur aux stagiaires. Il partagera son point de vue et confrontera ses idées avec vous, tout en alimentant votre connaissance du marketing !

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