trillions, c’est le nombre d’octets de données produits chaque jour par l’humanité.
La Data ne cesse d’innover et de se transformer. Smart Data, Big Data, Data Visualisation, enrichissement, collecte, ciblage, personnalisation,… On ne compte plus les concepts et les pratiques liés à l’utilisation des données dans le monde de l’entreprise. Et cela ne semble pas près de s’arrêter, puisque la Data a trouvé un nouveau compagnon de route, l’Intelligence Artificielle, pour former un couple inédit : la Big Data Intelligence.
Les composants de la Big Data Intelligence
D’un côté se trouve la donnée sous sa forme moderne : riche, volumineuse, omniprésente. On l’appelle Big Data, un nom qui représente à la fois l’énorme quantité d’informations qui est aujourd’hui produite et enregistrée mais aussi tous les mécanismes qui permettent de la digérer, de l’interpréter et de l’utiliser. Au sein de l’entreprise, la donnée révolutionne petit à petit les métiers, des habitudes de prospection aux étapes de création ou de relation client. Le Big Data transforme donc les acquis, mais il est aussi à l’origine de concepts nouveaux comme la Data Visualisation ou le job de Data Scientist (élu métier le plus sexy en 2016 par Harvard Business). De nombreux enjeux y sont également liés, avec en tête de liste les problématiques de stockage, de traitement et d’enrichissement, car les données ne sont pertinentes que si elles sont exploitables. Ainsi, aujourd’hui, 88% de toute la data disponible dans le monde n’est pas analysée, faute de ressources. (1)
De l’autre côté se trouve l’IA, l’Intelligence Artificielle, résumée en la capacité pour une machine de réaliser des tâches sollicitant normalement l’intelligence humaine. Si le concept a déjà plusieurs décennies d’ancienneté, il est aujourd’hui de plus en plus répandu et populaire grâce aux récentes évolutions technologiques. Le machine learning ou le deep learning, par exemple, qui confèrent aux machines des capacités d’apprentissage, comptent parmi les développements de l’IA les plus en vogue. Et comme la data, l’Intelligence Artificielle a envahi le quotidien, qu’elle soit embarquée dans une voiture autonome, un algorithme financier ou un jeu-vidéo.
Big Data et IA se complètent
Dans quelle mesure le Big Data et l’Intelligence Artificielle peuvent-ils se rapprocher ? En réalité, ces deux-là font mieux que ça : ils s’alimentent mutuellement. Aujourd’hui, les données sont tellement nombreuses qu’une collecte et un traitement efficaces ne peuvent se passer de la puissance informatique et de ses capacités de calcul. Le Big Data dépend de l’IA.
A l’inverse, l’Intelligence Artificielle se complait dans l’abondance de données. Plus il y a de data, plus il est aisé d’en dégager des tendances et d’interpréter des phénomènes, surtout dans des logiques de deep learning où la machine apprend en analysant toujours plus d’informations. De fait, l’IA a besoin du Big Data.
Une progression stupéfiante du volume de données mondial
En 2016, le volume total de données produites dans le monde était égal à 16 Zo (zettaoctets). En 2025, on estime que la sphère des données mondiale atteindra les 163 Zo. (2) “Ce qui est étonnant, ce n’est pas que la production de données à stocker augmente, mais le rythme effréné de cette augmentation” – Jeff Fochtman, Seagate. (3)
Les enjeux de l’union de l’IA et du Big Data
Dans la pratique, l’Intelligence Artificielle permet de concrétiser les promesses du Big Data, voire de les amplifier. En traitant les données plus vite et à plus grande échelle, elle repousse les limites de la personnalisation, du marketing prédictif, du recrutement,… à condition toutefois de relever les défis inhérents à la Big Data Intelligence.
Les applications de l’IA
Pour une entreprise data-driven, l’utilisation de l’Intelligence Artificielle peut offrir de nombreux avantages à ses différents pôles. Pour du marketing automation, par exemple, l’IA étend les possibilités : grâce à toutes les données clients dont elle dispose, elle peut créer des scénarios de mail, effectuer des relances ou prospecter avec une régularité, un ciblage et une personnalisation du message inédits. Rubikloud, société canadienne spécialisée dans l’analyse de données par IA à destination des retailers, vient justement de réaliser une levée de fonds de 45 millions de dollars pour se lancer en Europe et en Asie, preuve de l’engouement pour ce type de pratique. (4)
Le perfectionnement des chatbots, capables d’adapter leur discours selon leur interlocuteur (et des données en base sur ce dernier), est un autre exemple de l’amélioration des tâches automatisées par l’IA grâce à la data. Les efforts de fidélisation pourront aussi profiter de ces avancées, en sachant exactement quand et comment solliciter le client pour effectuer un nouvel achat.
225 millions d’Euros investis pour fidéliser par la Data
Le Groupe AccorHotels a développé un système de fidélisation basé sur les données de réservation de séjours de sa clientèle. Le couple Big Data & IA permet ici une mécanique de relance millimétrée via des suggestions de chambres et de destinations de vacances en fonction des séjours passés dans les hôtels et la navigation web des utilisateurs (cookies), mais aussi de la météo en live, des posts Twitter ou des avis laissés sur TripAdvisor. (5)
Dans les pratiques de marketing prédictif, qui comptent parmi les principaux enjeux du Big Data, l’IA apporte aussi sa contribution. Avec une meilleure capacité de traitement, il est possible de multiplier le nombre de données analysées pour anticiper les comportements des prospects et clients.
Auparavant cantonnées à un spectre de data limité, exploitable par des process traditionnels et à taille humaine, les entreprises peuvent aujourd’hui augmenter massivement le volume de données à interpréter. L’IA offre donc plus qu’un traitement accéléré et efficace, mais réduit aussi les marges d’erreur en tirant plus de sens d’un corpus élargi.
Anticiper les départs chez les concurrents
Pour éviter que ses clients ne changent de solution au profit de ses concurrents, la Société Générale a perfectionné son analyse prédictive des “départs”. En intégrant l’IA au Big Data, la banque est parvenue à retenir quatre fois plus de clients qu’auparavant, grâce à une vision plus fine de leurs attentes et comportements. “Avant notre modèle fonctionnait avec un nombre limité de variables. [Il] prend désormais en compte des centaines de variables et il n’y a plus un modèle, mais « n » modèles appliqués à « n » populations” – Bertrand Cozzarolo, Société Générale (6)
L’aide à la prise de décision est une autre plus-value de l’exploitation de données : en offrant un regard clair sur les risques, opportunités et toutes les variables concernées, la data permet de choisir la meilleure option. Comme pour la prédiction, l’ajout dans l’équation de l’Intelligence Artificielle permet d’aller plus loin : plutôt que d’extraire une tendance depuis une dizaine de variables, il est possible de le faire depuis des centaines voire des milliers de variables. L’analyse est alors plus fine, plus fiable, et la prise de décision facilitée car les risques associés sont davantage identifiés.
Mieux, l’IA tend à prendre de plus en plus de poids dans la décision, au point de choisir à la place de l’humain. Dans l’exemple des chatbots, l’Intelligence Artificielle peut orienter l’utilisateur vers la meilleure solution grâce à l’analyse des données en bases et celles reçues en temps réel dans l’échange.
Des séries conçues par le Big Data
Netflix est un expert de la data. Outre un système de suggestions intelligent qui propose aux spectateurs des films et séries ultra-ciblés (en fonction des derniers visionnages, des acteurs récurrents, de recherches sur le site,…), la société a également créé des programmes entièrement basés sur une analyse de données. La fameuse série House of Cards a été lancée car Netflix avait identifié que les fans de la série britannique d’origine aimaient Kevin Spacey (acteur principal) et David Fincher (le producteur). Une success story de la Data. (7)
Mais le marketing n’est pas le seul impacté, le recrutement grâce à l’IA et le Big Data est aussi à l’ordre du jour. L’usage évident est la possibilité de cibler des candidats parmi un panel plus large. Mais l’apport de l’IA ouvre à nouveau des portes.
L’heure est ainsi au recrutement prédictif, ou comment être certain que les candidats ciblés correspondront parfaitement au poste et à l’entreprise, avant même de les recevoir en entretien. Comme pour la prise de décision, l’analyse massive des données récoltées sur un candidat sert la réduction des risques (mauvaise intégration, manque d’engagement dans le travail,…). Pour gagner en efficacité dans le recrutement et en productivité dans l’embauche, les employeurs sont de plus en plus incités à recourir à des algorithmes de recrutement avancés : “Depuis 2014, ce type de modèle commence à séduire le monde du recrutement car il réduit les incertitudes » – David Bernard, AssessFirst. (8)
Limiter le turn-over et accélérer le recrutement
Pour une entreprise comme le BHV, qui embauche entre 400 et 600 personnes par an, l’efficacité du recrutement est une question importante. Le passage à une méthode prédictive a permis de diminuer de 30% les délais de recrutement et de fortement réduire le turn-over grâce à la sélection de profils plus en accord avec les postes. “Grâce à cet algorithme, nous avons réduit d’un tiers la durée du processus de recrutement, qui est passée de 45 à 30 jours, tandis que le taux de turn-over a été considérablement réduit” – Fathallah Charef, BHV Marais.
De manière plus globale, et à mesure que le Big Data se démocratise dans les entreprises, l’implication de l’Intelligence Artificielle va toucher tous les services : le marketing bien entendu, où le besoin de connaissance client est primordial, la Business Intelligence, les RH, la direction des achats, les fournisseurs,… Elle jouera également un rôle de plus en plus prépondérant à différentes étapes dans le fonctionnement de l’entreprise. Dans le marketing, par exemple, IA et Big Data peuvent autant participer à l’élaboration d’un produit qu’à la fidélisation après achat. Le couple aura aussi fort à faire dans d’autres branches, comme la logistique, avec des entrepôts intelligents, où les données générées par les équipements conduiront à un modèle de maintenance prédictive. (9)
Pour aller plus loin : A qui profite la Data en entreprise ?
Big Data Intelligence : les défis à relever
Si l’IA semble placer à portée de main les promesses du Big Data et en présenter de nouvelles, plus ambitieuses, le couple va devoir cependant relever plusieurs défis pour libérer son plein potentiel. Le premier est celui de la technologie, de son coût et des compétences nécessaires pour l’utiliser. Si la puissance informatique permettra de sous-traiter des tâches aujourd’hui réservées à des profils experts, ces derniers seront toujours indispensables à toute entreprise voulant exploiter pleinement les données à sa disposition. Les compétences en data visualisation seront tout aussi prioritaires pour transmettre les analyses de l’IA aux équipes opérationnelles : plus elles seront riches, plus le besoin de clarté dans l’information sera important. Les entreprises devront également investir dans les moyens nécessaires à une Big Data Intelligence, qu’elle soit internalisée ou confiée à des sociétés externes spécialisées. Enfin, les capacités informatiques sont encore aujourd’hui à un stade initial, bien que leur croissance soit flagrante. L’arrivée de nouveaux matériels (comme les ordinateurs quantiques) ne pourra être qu’une aide à la démocratisation de l’IA.
Le deuxième défi principal concerne la sécurité des données. De plus en plus nombreuses et exploitées, l’éventualité de leur détournement peut représenter un risque dans le développement de la Big Data Intelligence. Un système d’IA hackée pourrait en effet avoir des répercussions dramatiques pour une société fonctionnant sur des systèmes prédictifs, d’où l’importance de développer des systèmes sécurisés.
Enfin, dernier défi de taille, et sans doute le plus difficile à traiter : celui de l’éthique. Dans quelle mesure les données peuvent-elles être utilisées ? Jusqu’où la prise de décision par IA peut-elle s’étendre ? Il n’existe aujourd’hui aucune loi sur l’Intelligence Artificielle, bien que des initiatives soient lancées, comme le rapport de la CNIL remis en décembre 2017 et qui pose les bases d’un débat sur l’encadrement éthique et la régulation du développement d’algorithmes et d’IA. (10) Un débat qui s’initie à l’échelle mondiale, et qui deviendra crucial quand la Big Data Intelligence aura pleinement investi des domaines autres que celui de l’entreprise, comme la sécurité, la santé ou l’éducation.
En recentrant la réflexion sur le monde de l’entreprise, cependant, il ne fait aucun doute que la Big Data Intelligence sera de plus en plus exploitée. L’IA repoussera les limites fixées par le Big Data, qui elles-mêmes étaient encore inimaginables il y a une décennie à peine. Le marché de l’Intelligence Artificielle a ainsi crû de 59% entre 2016 et 2017 (12,5 milliards de dollars), et devrait poursuivre sur un rythme annuel de 50% jusqu’en 2020 au minimum. (11)
(1) Big Data : 90% des données existantes ont été créées ces deux dernières années – Comarketing News
(2) Data Age 2025 – Seagate – IDC
(3) L’explosion du volume de données fait saliver l’industrie du stockage – Les Echos
(4) Rubikloud lève 37 millions de dollars pour s’étendre en Europe et en Asie – LSA
(5) Big Data & Intelligence Artificielle : enjeux et challenges – Le Blog Du Dirigeant
(6) Comment la Société Générale utilise la data et l’intelligence artificielle, en trois exemples – Usine Digitale
(7) Netflix et le culte du big data : la traque des habitudes du téléspectateur – France 24
(8) Le recrutement prédictif déniche le meilleur salarié grâce aux algorithmes – Journal du Net
(9) Robots, Big data, IA… le futur de l’entrepôt logistique – Industrie & Technologies
(10) Intelligence artificielle : faut-il une loi ? – Les Echos
(11) L’IA en pleine croissance – IDC
Je pense que l’un des principaux avantage réside, comme le souligne le témoignage d’Accor, dans un ciblage plus précis, et donc une meilleure perception par la personne qui recevra le message. Définitivement, je pense que l’avenir de la communication des marques doit passer par un ciblage fin et non par du spam massif comme ça peut encore se faire actuellement.